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Affichage des articles du juin, 2017

Brève du thé # 2 : le thé dans la pratique

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Les septs règles du Thé : « D’abord, préparer un bol délicieux ; placer les charbons de façon à ce que l’eau boue ; arranger les fleurs comme si elles étaient dans un champs ;  en été, suggérer la fraîcheur, en hivers la chaleur ; tout faire en avance ; prévoir pour la pluie et dédier toute son attention à vos compagnons. » — Sen no Rikyu  (qui aimait improviser des bréviaires) Dans toute cérémonie du thé, il y a au moins trois étapes : la purification des ustensiles, la préparation du thé puis le nettoyage des ustensiles. Ce sont là les seules étapes irréductibles qui se retrouvent dans toute pratique du thé (à ma connaissance), même minimale. Qu’est-ce qu’une « cérémonie du thé » ? Décrite le plus sommairement possible, il s’agit d’un évènement organisé par un hôte dans un lieu adéquat ou non avec des invités généralement préparés pour l’occasion. Un certain nombre de codes régissent le comportement de l’hôte et sa façon d...

L’amateur de Chawan #2 : La céramique et sa chaire

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La flamme faite terre. Les amateurs de céramiques ont parfois un rapport charnel aux pièces qu’ils aiment, surtout aux bols de thé. C’est la part érotique de cet art dont j’aimerais parler aujourd’hui. Une pièce réussi n’est jamais vraiment froide. Elle conserve toujours une certaine tiédeur et, lorsqu’elle contient le précieux matcha, elle ne brûle ni ne déçoit. Un bol qui réagit ainsi au thé peut être appelé sans honte un chawan . Passé ce premier contact, sa peau est douce ou rugueuse, sa courbe fine ou lourde.  Les goûts et les couleurs se discutent à l’infini : mais le bol aura toujours en lui cette beauté accueillante.  Je dis accueillante parce que la forme même du bol est le receptacle par excellence : il ne peut vraiment agresser celui qui le contemple puisqu’il ne fait que recevoir. Et, peut-être à cause de cela, ou plus simplement parce que tout bol à une lèvre, mais chacun d’entre eux a son propre  sourire, sa propre manière de s’adresser à no...

Brève de thé # 1 La cérémonie du thé c’est quoi ?

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S’il fallait définir la cérémonie du thé simplement, comment faire ?  « Le thé n’est rien d’autre que cela : d’abord faire chauffer l’eau, puis faire le thé et enfin le boire de la bonne façon. C’est tout ce qu’il y a à savoir. » — Sen no Rikyu  (également auteur de centaines d’autres maximes sur le Thé qui rendent celle-ci nettement plus obscure) Entrez dans un monde de simplicité... La cérémonie du thé a pour nom japonais  Sado  ( 茶道 ).  Sado  devrait se traduire par la Voie du thé.  et « Voie » doit ici être entendu au sens fort que les asiatiques donnent à ce terme : comme un chemin pour guider sa propre vie, l’occasion d’une méditation permanente sur la manière de mener sa barque.  Mais la cérémonie du thé est également appelée  chanoyu  ( 茶の湯 ), ce qui signifie « eau chaude du thé ». Les explications de cette seconde dénomination sont nombreuses et je ne me risquerais à en me...

La responsabilité du céramiste

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Newsletter #2 En céramique, contrairement aux idées reçues, il n’y a pas de repentir : ce qui est fait ne peut être changé. Cela donne un étrange sens des responsabilités. La conséquence du geste. Cette responsabilité commence dès la confection de l’argile, lorsqu’il s’agit de mêler définitivement différentes terres. Puis vient le moment de concevoir les grandes lignes de la pièce qui seront ensuite creusées. Ce gros bout de terre peut sembler anodin mais il décide déjà de toute la structure de la pièce.Dès le premier coup de main, dès le premier contact de la paume, une forme se crée et elle ne pourra pas être défaite. Chaque geste influence toute la pièce. Il n’y pas d’opération chirurgicale pouvant corriger sans dérégler.  Peut-être est-ce pour cela que les gestes des grands céramistes ont l’air si simple : il faut faire vite,  tout former dans un même mouvement et sans avoir à rattraper au vol quelques détails. Cette simplicité est en réalité le f...

Brève du thé #4 : la diversité du thé entre deux pôles

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« À cette époque, les deux villes où le Cha-no-Yu était en plein essort étaient Sakai à l’est et Hakata à l’ouest. L’esprit de Sakai était ésotérique et calm, celui de Hakata digne et magnifique ( magnificient ). Rikyû et Sôkyû était typiquement de l’est, Sôshitsu et Sôtan de l’ouest. De Hideyoshi, on pourrait dire qu’il avait tendance à prendre l’est comme professeur et l’ouest comme ami. » — A.L. Sadler,  The Japanese Tea Ceremony (je traduis de l’anglais) De ce que j’ai pu lire, on peut identifier deux « racines spirituelles » au Thé moderne. Je dis « racine » mais ce ne sont pas certainement les seuls pratiques qui ont inspirées le Thé moderne, mais ce sont certainement deux « pôles » de la pratique. Ces deux pôles, je les appelle le pôle mondain et le pôle méditatif. Correspondent-ils aux deux villes mentionnées par A.L. Sadler (qui cite ici un texte sans mentionner la référence exacte) ? Je ne saurais le dire avec certitud...

Amateur de Chawan #1 : Paysage céramique

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Un mont, un bol et milles images Il y a de cela quelques jours, je regardais un chawan de Sasaki Kyoshitsu  tout en préparant mes propres bols. Le mont Fuji jaillissait dessus en blanc os sur le noir brillant. C'était comme si le mont réapparaissait devant moi dans une nuit d'encre. Il donnait à voir un contraste étrange avec la douce brise de ce début de Juin et son soleil presque sans ombre. Alors je me suis demandé : mais pourquoi le Mont Fuji est-il si fascinant ?  Le mont Fuji est à lui seul un paysage célèbre. Pas besoin de dessiner quoi que ce soit autour, ni même de préciser de quelle face on parle. Sa forme suffit à le faire reconnaître sur les estampes et les affiches publicitaires. La première fois que je suis venu au Japon je n’ai pas vu le mont Fuji et je ne comprenais pas cet engouement des Japonais pour ce qui n’était, après tout, qu’une montagne de taille assez banale. Je pensais alors que les Japonais aimaient leur unique grande ...

Ishin denshin ou le silence qui parle

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Newsletter #1 L’expérience sans mot À l’atelier de Sasaki Shoraku, nous parlons peu. Notre communication passe par les mains, quelques regards et de la pratique. Le rire simple aussi, parfois. Les japonais appellent cela ishin denshin ( 以心伝心 ) : « ce que l’esprit pense, le coeur transmet ». C’est de la communication non-verbale, de la compréhension tacite — c’est-à-dire l’hypothèse d’une compréhension mutuelle. Mais est-il d’ailleurs vraiment besoin de parler ? Passé le moment des explications, chacun est seul devant son établi, en tailleur (pour ceux qui tiennent assez longtemps dans cette position), regardant la montagne qui fait face à l’atelier. Et le travail commence, les pièces s’enchaîne. Mes pièces sont des pièces uniques…parce que je suis bien incapable pour l’instant de « reproduire » un travail. Cela demande des années à vrai dire. Il n’y a pas de méthode vraiment « industriel » mais l’expérience donne un précision peut...

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